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The Party de Blake Edwards (mardi 17 septembre 2013, 20h30)


Bande-annonce du film.

Le ciné-club revient !
La saison commence dans la bonne humeur avec la comédie américaine de Blake Edwards...

Durée : 99 minutes.
Couleur.
Pays : USA.
Année : 1969.
Avec : Peter Sellers, Claudine Longet, J. Edward McKinley.
Rapide synopsis : Hrundi V. Bakshi, un acteur indien, est engagé par un studio hollywoodien pour interpréter un soldat indigène dans un remake de Gunga Din. Faisant preuve d'une terrible maladresse, il fait exploser un coûteux décor. Exaspéré, C.S. Divot, le producteur, demande à ce que le nom de Bakshi soit inscrit sur une liste noire. Mais suite à un quiproquo, le comédien indien se retrouve en fait invité à la soirée annuelle du studio...
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Et pour résumer :
Rendez-vous le mardi 17 septembre 2013, 20h30
en salle Dussane, au 45 rue d'Ulm

pour voir ou revoir
The Party
de Blake Edwards

Proposition d'analyse

DRÔLE D’OISEAU

Rares sont les films dont l’argument narratif ne tient qu’à une bride de sandale, un simple bout de cuir défait, lequel rime instantanément avec «effet». Il suffit que Peter Sellers -alias Hrundi V. Bakshi- remette en place la lanière de sa chaussure de figurant pour anéantir une superproduction hollywoodienne.

«Get off of my set, get off of my picture!» menace le réalisateur, d’une voix fébrile. Radié des plateaux pour avoir détruit en une fraction de seconde un somptueux décor extérieur, Hrundi V. Bakshi laisse ainsi son costume de figurant au vestiaire. Un film de perdu, donc ; mais, de ce starter explosif, c’est aussi un film de lancé. Que The Partycommence !

En effet, un autre réalisateur, et pas des moindres, donne une seconde chance à Hrundi V. Bakshi : Blake Edwards propulse Peter Sellers – précieux complice depuis The Pink Panther (1963) - comme une boule de flipper sur un nouveau terrain, la villa ultramoderne d’un producteur richissime.

Dès lors, le film devient la captation fascinante de l’agonie d’un décor, le compte- rendu pas à pas du court-circuitage d’un huis clos. Si Hrundi V. Bakshi, dernier nom sur la liste noire, est censé être celui qu’on ne doit plus voir, il devient l’élément central de la narration, un corps sur lequel glisse l’espace, celui qui nous donne tout à observer; il devient le regard sur lequel chaque pan de (ré)action se raccorde.

Pour ne pas perdre pied, suivez donc le guide, même si ce dernier ne connaît que le hors piste, au point de se muer en éclaireur de hors champ. Il déambule et cueille d’une moue radieuse les solitudes éparpillées, les silhouettes qui se meuvent sous les lumières artificielles : le cow-boy en vacances, la starlette italienne, la danseuse effrénée, le serveur à l’ardeur éthylique, la douce French girl. Oui, eux aussi sont de la partie ; mais ces invités d’honneur font-ils vraiment la fête ? Silhouettes ultra dessinées, toutes sur un pied d’égalité, ces présences fantoches paraissent faire partie des meubles.

... QUI D’UN COUP D’AILE FAIT TOMBER LES BARREAUX.

Peter Sellers a beau avoir troqué l’accent frenchy de l’inspecteur Clouseau contre une prononciation indienne (le fameux « Birdy num num » en est le point culminant), on ne peut s’empêcher de revenir à l’Hexagone, de penser à un confrère français, Monsieur Hulot.De la demeure hollywoodienne délirante à la villa Arpel de Mon Oncle (1958), il n’y a qu’un pas ; et de la scène de restaurant dans PlayTime (1967) à celle du dîner dans The Party, il n’y a qu’un plat.

Alors, mécanique du burlesque oblige, la rencontre entre corps et décor fait des étincelles. Parce que sophistiquée jusqu’à l’absurdité, cette maison est condamnée à s’émietter. Un démiurge semble même l’avoir conçu dans cette unique visée ; chaque objet mis à nu est une brique enlevée à l’édifice, chaque coin dévoilé un mur porteur qui tombe. Le découpage de The Party paraît procéder selon cette même logique soustractive : chaque nouveau plan participe de l’élaboration d’une carte globale du décor dans le même temps qu’elle l’autorise à se déchirer ; car chaque nouveau plan est l’affaire du point de vue de Hrundi V. Bakshi donc synonyme d’une destruction imminente.

Ainsi, The Party apparaît comme la manifestation de la maîtrise jouissive de Blake Edwards. En provoquant, dans l’éclat d’une partition de gags, l’écroulement littéral du rêve hollywoodien, il fait figure d’une liberté délectable, s’affranchit de la pression du traditionnel cinéma de studio. Une fois toutes les portes ouvertes, une fois les derniers murs tombés, The Party finit enfoui sous la mousse, la pellicule tourne au blanc, l’écran retrouve son heureuse nudité originelle avant que le petit matin, et ce qu’il confère de soudain désenchantement, ne lui redonne quelques couleurs.

Des bulles plein les yeux et la bouche, du saxophone plein les oreilles ; nul doute que l’euphorie permissive des sixties finissantes de The Party est une occasion de prendre son pied. Mais, en sortant de la salle, de l’obscurité, prenons garde à l’endroit où l’on va le poser... À tout moment, la party menace de recommencer.

Claire.