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The last show, de Robert Altman (mercredi 26 octobre 2011)





Rendez-vous le mercredi 26 octobre, à 20h30
en salle Dussane, au 45 rue d'Ulm
pour
The last show
de Robert Altman
En attendant un synopsis et une présentation d'Ecocampus, voici la présentatio



Depuis trente ans, l’émission de radio hebdomadaire A Prairie Home Companion fédère un public fidèle autour d’une petite troupe de chanteurs et d’amuseurs : il y a là les sœurs Johnson, les cow-boys Dusty et Lefty, le vieux Chuck et bien d’autres, réunis autour du flegmatique maître de cérémonie, Garrison Keillor. Mais l’émission de ce soir au Fitzgerald Theater de Saint Paul, Minnesota, pourrait bien être la dernière...

Un monde à part

Dès les premières minutes du film, la caméra de Robert Altman semble soulever le spectateur pour le déposer comme par magie à Saint Paul, d’abord au Mickey’s Diner pour un bref prologue, puis au cœur du Fitzgerald Theatre, dont il ne ressortira qu’à l’extrême fin du film. Comme dans Nashville ou Gosford Park, Altman articule The Last Show autour d’un lieu central ; ici, le Fitzgerald Theater, un espace clos et protégé sans fenêtres sur l’extérieur mais dans lequel les nombreux miroirs reflètent à l’infini une lumière chaude et enveloppante. C’est un petit monde chaleureux, autarcique et anachronique peuplé d’une troupe d’irréductibles s’échinant à prolonger jusqu’à notre époque l’heure de gloire de la radio d’après-guerre, de ses chansons country et de ses fausses réclames ringardes – A Prairie Home Companion était d’ailleurs une véritable émission de radio orchestrée par Garrison Keillor lui-même, qui a écrit le scénario de The Last Show et y joue son propre rôle. 




Ce film choral suit ses différents personnages en faisant la navette entre les loges et la scène, entre devant et derrière le rideau... Ces créatures pittoresques sont les mêmes dans la vie et sur scène : si le public est bien présent dans le théâtre, il est très peu montré à l’écran et se ferait presque oublier, tant l’action sur scène est la continuation de la vie réelle et intime. Le scénario de The Last Show ne comporte pas de ligne narrative forte : essentiellement constitué d’une série de numéros et d’intermèdes en coulisses, il s’attache avant tout à créer une atmosphère à la fois nostalgique et festive où l’humain, dans ce qu’il a de plus attachant, est au centre de l’attention.

Un double adieu

The Last Show est à la fois un adieu à une certaine forme de divertissement et un adieu de Robert Altman à son public. Conscient qu’il ne lui reste plus beaucoup de temps, puisque les compagnies d’assurances l’ont déjà contraint lors du tournage à se faire assister d’un autre metteur en scène, Paul Thomas Anderson, il livre en quelque sorte un film testament où la mort rôde en permanence, sous les traits du Texan qui rachète la station de radio et représente le spectre de la fermeture, et sous ceux de la mystérieuse Asphodèle, ange annonciateur de mort. Servi par un casting de luxe réuni autour du grand Altman, The Last Show a comme un parfum de crépuscule des dieux. Pourtant, le réalisateur livre un film joyeux et fédérateur, véritable hommage sans arrière-pensée à ce divertissement à l’ancienne, plein de tendresse pour ces ringards sympathiques et désuets.

L’humour dans The Last Show n’est jamais teinté de cynisme ; ni corrosif ni subversif, il est bienveillant, rassembleur. Altman évoque le temps merveilleux d’un âge d’or dont il fustige le liquidateur, le Texan inculte et obsédé par l’argent, mais ne se départ pas d’un certain fatalisme lucide ; quand bien même tout serait vain et voué à la disparition, il faut faire comme si, the show must go on !

Foisonnement et mélange des genres

Sous une apparence d’unité et de simplicité, The Last Show se situe au confluent de plusieurs genres et de plusieurs registres. Son sujet même le range naturellement dans la catégorie du film musical, mais Altman joue sur plusieurs autres codes génériques : l’apparition de l’ange Asphodèle marque une incursion dans le domaine du fantastique, en même temps que le traitement de ce personnage de femme fatale à la Lauren Bacall évoque invinciblement le film noir. En outre, la frontière entre réalité et fiction est rendue floue par le caractère historique et bien réel de cette émission de radio, dont bon nombre de participants de la première heure jouent leur propre rôle dans le film, dans le théâtre même de Saint Paul qu’ils avaient souvent investi dans le passé, si bien que certains plans évoqueraient presque le documentaire. C’est d’autant plus vrai que, lors du tournage, Altman confronte des numéros chantés et joués, savamment orchestrés et répétés par les acteurs, à un véritable public dans la salle. 

Tout au long du film, les bad jokes et la musique voisinent avec la mort, la country succède à la soul, le comique grotesque côtoie l’esquisse d’une réflexion métaphysique... Pour accompagner ce foisonnement, la caméra est très souvent bercée par un léger mouvement de travelling latéral, ce qui a pour résultat un effet à la fois de mobilité et de ralenti, donnant une certaine fluidité aux rapports entre les personnages, entre les différents espaces... Le cadre est toujours très travaillé, surchargé d’objets, plusieurs éléments attirant en même temps l’œil du spectateur dans un même plan, et comme souvent, Altman privilégie les dialogues superposés les uns aux autres dans des séquences sans doute largement improvisées où les voix fusent. Les chansons se confondent alors avec le vécu des personnages, le théâtre se fait plateau de cinéma, en même temps que la dernière émission de la troupe se révèle le « last show » du réalisateur.

Virginie